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Permaculture et "foodforest" : un exemple d'aridiculture en climat méditerranéen très sec
version 3.4 - 03/06/14
Permaculture et "foodforest" : un exemple d'aridiculture en climat méditerranéen très sec (centre Var, France) - Mars 2012.
par Sylvaine Anani et Éric Escoffier
Sur un terrain dans le centre du Var (France), nous expérimentons depuis l'année 2000, avec des moyens très limités et à petite échelle, une petite "foodforest" (forêt alimentaire ou forêt-jardin) en aridiculture d'environ 300 arbres et arbustes, plus des vignes. Sol argilo-calcaire. Gelées en fin de nuit en hiver (-8°C couramment, rarement -12°C). Pas de gelées tardives. Probablement le micro-climat le plus sec et chaud de France en été en journée. Fréquents épisodes de violent mistral sec et froid en hiver, et brûlant et déssechant en été. Aucune pluie en saison de végétation (sauf en 2000 et 2011). Plusieurs années d'affilée, aucune pluie non plus au printemps. Cumul ayant chuté à 35 cm annuels certaines années. 12 mois consécutifs sans pluie en 2003-2004. Pas d'eau sur le terrain hormis la pluie. On stocke facilement une trentaine de mètres cubes l'hiver grâce au toit. On pourrait facilement en stocker plus, mais on n'en a pas besoin car l'expérience consiste justement à cultiver au sec (et évidemment sans pesticides ni fertilisants) des espèces alimentaires et utiles, des fruitiers et des fruitiers rares, ou en tout cas méconnus et sous-utilsés.
On pourrait se contenter de dire que ça pousse à son rythme, c'est-à-dire très lentement au début si on compare à des vergers irrigués. Mais il y a bien d'autres informations à donner quant à cette expérience d'aridiculture, que nous allons succinctement résumer ci-dessous.
Donc, les fruitiers et fruitiers rares que nous avons plantés poussent lentement au début. Mais chaque année, il y a de plus en plus d'arbres qui sont sevrés (c'est-à-dire qui se passent totalement des ombrières et de l'arrosage), et qui font leurs premières fleurs et premiers fruits. Les vitesses de croissance s'accélèrent de plus en plus (exponentiellement plutôt que linéairement).
Les ombrières, ce sont des sacs de jute récupérés à une usine de café et enfilés verticalement sur 2 tuteurs ou fers à béton plantés verticalement de manière à ce que le sac ombre l'arbre par le sud. Le jeune arbre n'est donc touché que par le soleil du matin et du soir. On les installe tout début juin en général et les enlève à l'automne, (sauf pour les agrumes, asiminiers et autres espèces forestières de sous-étage qui préfèrent l'ombre toute l'année). C'est du travail. (C'est une grave erreur d'avoir planté à la lumière directe du soleil.)
La diversité floristique (herbacées) et faunistique (insectes, oiseaux...) a explosé et continue de croître depuis qu’on a cessé toute fauche, et le sol s'améliore grâce à cet enherbement pérenne non fauché. Le feutrage total par plateaux de tallage des graminées qui recouvrait initialement toutes les parcelles ouvertes (chaque année depuis des décennies, le terrain était fauché aux pires moments, c’est-à-dire printemps et début d'été) a quasiment disparu. Dans une bonne partie des parcelles, les graminées ne sont et ne seront jamais plus concurrentielles. (Nous rappelons que les graminées, lorsqu'elles sont fauchées ou pâturées avant épiaison, et uniquement dans ce cas, exercent, par ce feutrage par plateaux de tallage, une sévère concurrence (*) sur les arbres et les plantes en général...)
Les arbres n'ont pas de maladie. Les premières années, les poiriers avaient la rouille, et les pommiers étaient de véritables "HLM à pucerons/fourmis" ! Tout cela a disparu : ces dernières préfèrent maintenant élever leurs pucerons sur les "genêts" (spartiers à tiges de jonc), chardons, scabieuses maritimes et autres espèces sauvages. La rouille a disparu aussi.
Il faut dire que nous avons laissé pousser dans les parcelles la végétation spontanée (une multitude d'herbacées et sous-arbrisseaux divers, et aussi clématite flammette, chèvre-feuille, ciste cotonneux, lentisque, "genêt" (spartier à tiges de jonc), cade, pin d'Alep, chênes vert et pubescent, érable de Montpellier, nerprun alaterne, filaires, troène, viorne tin, églantier, aubépine...). (C'est la diversité qui garantit à terme la résilience du système.)
Il n'y a guère que les pruneliers et les ronces, parce qu'encore trop présents (et ce tant qu’il y aura trop de lumière), qui s'avèrent non conviviaux pour les humains. On les arrache à la main, surtout les ronces, en début d'hiver avant qu'elles ne se marcottent, c'est finalement le plus efficace et le plus rapide. (On les roule et les dépose au pied des jeunes fruitiers par dessus le mulch. Comme les épines se détachent toutes seules en un seul passage de la ronce dans un tissu ou un cuir, on pourrait aussi en faire facilement de bons paniers et de solides cordes.)
De manière générale, la non-fauche de l'enherbement spontané, et une canopée d'espèces bien choisies au-dessus, constituent la gestion globale de la "foodforest".
Au niveau de chaque arbre, nous constatons toujours que :
- l'ombre
- et l'épaisseur + la largeur de mulch (en ce qui concerne les arbres transplantés, versus ceux issus de semis directement en place),
sont les 2 facteurs cruciaux pour la survie et le développement des jeunes arbres dans ce climat.
Troisième facteur très important : tailler très bas à la plantation (à 3 yeux au dessus du mulch par exemple) pour favoriser au maximum une forme buissonnante basse en phase juvénile, augmenter le rapport entre les systèmes racinaire et aérien ainsi que le rapport entre la surface foliaire totale et la longueur totale de rameau parcouru par la sève (car la génération de nouvelles racines en saison de végétation dépend de la surface foliaire totale).
Ces 3 facteurs (ombre, mulch épais et large, rabattage très bas à la plantation) jouent plus que l'arrosage pour l'établissement des jeunes arbres de pépinière.
Le mulch permet aux micro-organismes de fabriquer rapidement un sol structuré et fertile, qui nourrit parfaitement les systèmes racinaires et retient bien l'humidité. Le mulch bloque aussi l'évaporation, à condition qu'il soit épais, dans notre cas, d'au moins 20 cm, idéalement 30cm, et largement répandu autour du pied du jeune arbre (1 mètre de diamètre ne suffit pas). C'est un gros input.
Mais ça marche : l'arrosage est réduit au minimum pour les premiers étés (par arbre : 80 à 200 litres 1 fois par été, rarement 2 pour les espèces les plus délicates). Puis on cesse tout arrosage.
L'ombre a permis de doubler la durée de la saison de végétation : ici, en plein soleil, les feuilles des jeunes arbres stoppent la photosynthèse tout début juin. S'il pleut en septembre (mais ça n'arrive plus depuis plusieurs années), une nouvelle génération de feuilles peut pousser à l’automne dès que la lumière est moins violente. Au total, l'arbre aura poussé durant 2 à 3 mois maximum, malgré l'humidité et la qualité du sol sous le mulch. L'arroser plus n'y change rien, ce sont les feuilles qui ne sont pas dans les conditions qui leur permettent de fonctionner, tout simplement parce que la photosynthèse chez les végétaux ne se fait pas avec la lumière directe du soleil mais avec une lumière réfléchie (ombre relative).
A l'ombre, en revanche, les feuilles ne bloquent pas la photosynthèse de tout l'été et l'arbre pousse d'avril à fin septembre au moins, soit 2 fois plus longtemps. D'où beaucoup plus de nouvelles racines, ce qui est l'objectif premier pour un jeune arbre en climat sec l'été.
Le mulch qu’on avait déposé au pied des arbres, nous voulions qu'il se comporte comme un pur mulch le plus pérenne possible, et non pas comme du BRF ou du compostage en surface. Nous l’avons donc déposé sur le sol sans mélanger ni griffer pour ne pas induire de décomposition. C'était du déchiquetât de grosses branches et troncs sans feuilles après plusieurs mois de séchage (jusqu'à 15 cm de diamètre) de pin d'Alep local.
Cela a amélioré le sol d'une manière qui dépasse largement tout ce qu'on aurait pu attendre d'une si grossière imitation de la litière forestière (couleur, odeur, perméabilité, structure, macrofaune...). Cela grâce aux micro-organismes du sol qui se multiplient très vite dès que le sol est couvert.
Notre "mulch pérenne" aura finalement duré plusieurs années dans ce climat, ce qui était l’objectif. (C'est clair que plus il fait sec en saison de végétation, plus la fonction mulch est intéressante (versus les fonctions BRF et compost).)
Visuellement (et théoriquement), ce mulch n'est pas décomposé par des bactéries mais très lentement dégradé depuis le bas par les fameux champignons filamenteux blancs rendus célèbres par la mode du BRF...
Jusqu'à maintenant, pour les arbres de pépinière, ce qui a fait la différence, c'est le cocktail "ombrer/mulcher/rabattre à 3 yeux à la plantation". En effet, les premières années, on ne le faisait pas. On arrosait les arbres de pépinière, et c'est tout. Du coup, l'été 2003, les 300 fruitiers de pépinière sont morts, sauf 4 ou 5. On a replanté à l'automne 2003, on a appliqué la méthode ombre/mulch/rabattre, et depuis les arbres vivent et s'autonomisent. Mais quel input !
En revanche, ce fameux été 2003, aucun des arbres issus de semis directement en place n'est mort (amandiers, pistachiers et pruniers essentiellement), alors qu'ils n'ont jamais eu d'arrosage. Ce n'est pas l'espèce qui fait la différence, c'est le semis direct. (Il suffit de se pencher sur les systèmes racinaires pour comprendre...)
Depuis, nous n'avons cessé de constater, dans les tropiques comme ici, que la façon de loin la plus efficace d'installer des arbres est le semis direct. Et c'est plus rapide. Notamment en climat sans ou à courte saison de végétation (c'est-à-dire là où il n'y a pas ou peu conjonction entre période humide et période chaude au cours de l'année...).
Remarque : malgré les gelées nocturnes, les fruitiers semés directement en place sous canopée gardent les feuilles vertes tout l'hiver (les premières années du moins).
Comme il est possible de greffer des arbres de toute taille, si la variété issue du semis direct s'avère inintéressante à terme, on pourra toujours la greffer en place. En fait, la transplantation d'arbres de pépinière doit plutôt être réservée aux variétés/espèces de grande valeur qui sont infidèles au type ou difficile à faire germer en place.
Pour accélérer les choses, on aurait dû dès le début insister sur la canopée. Notre principale erreur est bien de ne l'avoir pas fait, c’était le plus important et la première chose à faire, notamment dans un climat si difficile.
Sous les pins d'Alep qui recouvrent une grande partie de la France méditerranéenne, c'est moins urgent car tout y pousse bien ; leur ombre est idéale et ils jouent parfaitement leur rôle de pionnier et d'aggradeur du sol, accélérant la croissance des espèces au dessous d'eux. (Nous rappelons que les pins (Pinus spp.), contrairement aux sapins et épicéas (Abies spp. et Picea spp.), ne sont pas acidifiants pour les sols.) Mais dans les parcelles ouvertes, il est crucial de semer les arbres de sur-étage dès le début pour constituer une canopée au dessus des cultures.
Il reste donc maintenant à semer ces arbres compagnons fertilitaires très densément intercalés (qui surpasseront bien des fruitiers en hauteur à l'avenir) : il faudrait une très grande proportion (au moins 50%) d'arbres pionniers diverifiés, comme par exemple Sophora japonica, Albizia julibrissin, Melia azedarach, frênes, févier d'amérique et Robinia spp. (éventuellement inermes ou non drageonnants...), et bien d'autres...
Même sous les pins d'Alep, il faudrait le faire, le but dans la région étant aussi de supprimer le risque incendie, donc de minimiser la proportion des espèces pyrophiles dès qu'elles ont fini de jouer leur rôle de pionnières fertilitaires (c’est-à-dire dès qu'elles ont permis un développement suffisant de la forêt alimentaire ou de la série forestière suivante).
Voici finalement la meilleure stratégie pour implanter une foodforest.
Dès le début, semer en mélange et à très forte densité la plus grande diversité possible d'arbres qui germent assez facilement : pionniers fertilitaires rapides bien choisis, si possibles des espèces multi-usages (nous avons mis au point une liste thématique ad hoc de critères/usages et une liste d'espèces correspondantes), ainsi que des porte-greffes et arbres de production (alimentaires, à bois d'oeuvre ou bois-énergie, etc).
Notes :
- Les 3 catégories ne sont pas disjointes.
- Ces espèces d'arbres pionnières compagnes sont le moyen de "faire pousser l'ombre (ou le parasol)", ainsi que la fertilité, un climat plus humide et une bonne résilience du système. (Principe d'inoculation d'un nucléus bien choisi de fertilité, qui s'accroîtra spontanément et gratuitement en utilisant la force de la nature et de ses processus spontanés (ré)génératifs...)
- Pour les espèces qui germent facilement, nous gardons tous les noyaux des fruits que nous mangeons...
- Il serait intéressant de semer beaucoup de ponciriers (Poncirus trifoliata) comme futurs porte-greffes pour les agrumes...
Si la diversité d'espèces est grande, la densité peut aller jusqu'à 2 m en tous sens entre 2 arbres de production, et n'a quasiment pas de limite pour les pionniers compagnons. (Un éclaircissage sélectif et/ou une conduite en "chop'n'drop" pourra avoir lieu au fil des ans.)
Il serait encore mieux de faire pousser le parasol au même endroit que l'arbre de production : on sème au même endroit les unes contre les autres quelques graines de pionniers et quelques-unes du fruitier par exemple, ces dernières au nord des premières (hémisphère nord). Les pionniers feront un parasol (et des tuteurs de signalisation/protection) croissant spontanément au dessus du fruitier tout en le fertilisant. (Dans les tropiques, le papayer fait un merveilleux tuteur/parasol croissant...)
L'important dans tout ça, c'est que les pionniers ombrent les fruitiers et autres arbres de production (tout en les fertilisant). Et aussi, c'est que tous ces arbres pousseront sans la moindre goutte d'arrosage, et sans mulch.
Ces fruitiers issus de semis directement en place mettront à fruit tardivement et produiront très longtemps et beaucoup. Ils constituent le capital de plus faible input et d'output maximum. (A noter que nombreuses sont les espèces/variétés qui sont en fait fidèles au type, en tout cas beaucoup plus que communément admis.)
Une proportion de ceux-ci pourra être greffée en place très tôt avec des variétés particulièrement intéressantes, et ce d'autant plus que l'espèce est infidèle au type (poire, pomme, asimine, certains bigarreaux...).
Mais il est toujours bon de garder une grande proportion non greffée jusqu'à la mise à fruit, car finalement, la majorité des fruitiers est assez fidèle au type. Les variétés qui s'avèreraient néanmoins mauvaises au goût pourraient à nouveau être greffés.
Il faut cependant garder non greffés quelques arbres de semis direct même si la variété est mauvaise, pour les animaux et pour constituer une banque de gênes...
Les arbres greffés directement en place mettront à fruit plus tôt et vivront moins longtemps que ceux non greffés. Ils constituent le capital d'input moyen et d'output moyen.
Enfin, on peut aussi planter une petite proportion d'arbres de pépinière de haute valeur, qu'ils soient greffés ou non, proportion d'autant plus grande que :
- on les plante près/en aval des stocks d'eau ;
- on les plante sous une canopée existante ;
- ce sont des espèces qui germent mal ici en semis direct (figuier, mûrier, kiwi...) ;
- ce sont des espèces/variétés très infidèles au type (pomme, poire, asimine...) ;
- ce sont des variétés de grande valeur (pour constituer ainsi une banque de greffons).
Ces arbres mettront à fruit très tôt et mourront très vite, surtout ceux qui sont greffés, et encore plus ceux qui sont greffés non sur franc. (Ces derniers devront d'ailleurs être taillés régulièrement...) Globalement, il aura fallu les planter le plus tôt possible en octobre ou novembre, les rabattre très bas à la plantation, les mulcher, les ombrer s'ils ne sont pas sous une canopée préexistante, les arroser 1 à 3 fois par été les premiers étés, donc avoir stocké de l'eau. Quel input, comparé au semis directement en place !
C'est le capital à très gros input et très bas output. (En conditions plus favorables (c'est-à-dire humidité en saison de végétation), ces arbres mettront à fruit plus vite, toutes choses égales par ailleurs...)
Là encore, quand tout ce petit monde sera grand et que les houppiers commenceront à trop se toucher, on pourra éventuellement élaguer et/ou gérer les arbres en chop'n'drop (et bien sûr utiliser la biomasse ainsi récoltée : feuilles alimentaires/médicinales, fourrage, mulch, bois, tuteurs, tanins, glus, fibres...).
Par ailleurs, on aurait aussi tout intérêt à greffer les sauvageons directement en place : la plupart des variétés de fruitiers classiques, mais aussi de sorbes domestiques, cornouilles, jujubes, azéroles, nèfles d'Allemagne, pistaches, chênes à glands doux... sont greffables sur les mêmes espèces ou leurs cousines sauvages.
Input relativement faible, pas d'arrosage, mise à fruit rapide, longévité moyenne mais facile à refaire régulièrement.
Et, très important, il faudrait aussi profiter des arbrisseaux, arbustes et jeunes arbres spontanés pour massivement semer directement en place, bien à l'ombre sous leurs branches côté nord, des fruitiers, des arbres à bois... et éventuellement aussi des arbres compagnons/fertilitaires. (Input quasi nul.)
Les plantes sauvages
Elles poussent spontanément. Si on se contente de les favoriser, on a un input quasi nul. Or, on redécouvre aujourd'hui à quel point elles sont plus nutritives que les plantes domestiques. (On insiste classiquement à tort sur le contenu des aliments en calories, hydrates de carbone, lipides, protides, en oubliant que le plus important reste les micro-nutriments (oligo-éléments, vitamines, sels minéraux, enzymes, en général catalyseurs du métabolisme, ainsi que les micro-organismes naturellement présents au bas des plantes...). Et aussi les "protéines chlorophylliennes" (non oléagineuses) que constituent les feuilles d'herbacées, d'arbustes et d'arbres lorsqu'elles sont comestibles.)
Quoiqu'il en soit, les plantes sauvages, et notamment les parties chlorophylliennes, jeunes pousses, fleurs, bourgeons..., mais aussi lichens, nostoc, ... sont des aliments particulièrement essentiels.
C'est là qu'entrent en jeu certaines parties du terrain, où nous avons créé un milieu, hélas, rare (et pourtant si facile à générer...) : c'est un milieu ouvert ni cultivé, ni fauché, ni pâturé. En effet, on trouve généralement soit des milieux fermés, soit des milieux labourés, fauchés ou pâturés. Ici, les parties dont nous parlons sont des milieux ouvert avec enherbement spontané pérenne jamais fauché ni pâturé.
A noter que, si on le désire, on empêche très facilement le milieu de se refermer, essentiellement en "tirant" (surtout ne pas couper !) les semis spontanés d'arbres et arbustes tant qu'ils sont jeunes, et bien sûr les ronces à l'automne. Et du coup, on peut observer les séries de milieu ouvert se succéder...
Résultat : comme on l'a dit, les plateaux de tallage des graminées se sont considérablement réduits. Du coup, ce sont maintenant les autres familles botaniques qui dominent, avec une véritable explosion de la diversité. Entre autres une incroyable diversité de salades sauvages et plantes comestibles excellentes et hautement nutritives, quasiment tout le long de l'année. Et de médicinales et autres plantes utiles... Et bien sûr, la fertilité du sol s'accroît vivement...
Voilà donc un système de "non-culture" de haute valeur pour un input très faible. (Cf. les travaux de François Couplan sur les plantes sauvages comestibles.)
Remarque : on a du mal à avoir certaines pionnières que nous adorons, notamment les crucifères comme le pastel des teinturiers, la passerage drave ou la diplotaxe fausse-roquette. La bourrache a eu du mal à s'installer. Pas de mauve, de chénopode, d'amaranthe, ni de pourpier spontanés... Il nous a fallu mettre un peu le sol à nu par endroits pour accélérer l'arrivée de ces savoureux marqueurs des sols très dégradés. Petit input, et ensuite miam miam ! En revanche, la scorsonère laciniée et les salsifis, les pissenlits, picris, crépis, laiterons, laitue de Saint-Joseph, cousteline, pâquerettes et autres composées liguliflores, mais aussi la petite pimprenelle, le plantain lancéolé, la gesse à large feuille, la vesce de Narbonne..., s'accommodent spontanément fort bien de l'enherbement permanent non fauché ni pâturé et d'un sol fertile, ainsi que d'une ombre assez marquée - ce qui bien sûr les rend bien meilleures, beaucoup plus productives et plus longtemps...
(*) Les autres cas de concurrence réelle entre plantes se résument en fait à quelques rares cas d’allélopathie négative, à la concurrence à la lumière en milieu très fermé, et à la concurrence aux nutriments et/ou à l'eau lorsque la diversité est trop faible, le sol à nu et le système irrigué...
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